"-Voici mon secret. Il est très simple. On ne voit bien qu'avec le coeur; l'essentiel est invisible pour les yeux. Les Hommes ont oublié cette vérité (...). Mais tu ne dois pas oublier: tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé."

Antoine de St Exupery

vendredi 6 mars 2015

Génétique équine: les robes, définitions et robes de base

Je m'attelle enfin à une série d'articles (parce que je pense que je serai obligée d'en faire plusieurs vu comme le sujet est vaste...) sur la génétique équine et plus précisément sur les mystères des robes.

Comme bien souvent lorsqu'on cherche des infos concernant des sujets un peu scientifiques (et encore plus quand il s'agit de sciences animales), on se rend vite compte qu'en France ba on est un peu largués et en retard comparé à d'autres nations...

En matière de classification des robes, par exemple, il y a 20 ans, quand j'ai passé mon premier galop, on apprenait le fameux BANC, BIS, GAL, R, P:
- les robes simples: Blanc, Alezan, Noir, Café au lait
- les robes composées de deux couleurs séparées : Bai, Isabelle, Souris
- les robes composées de deux couleurs mélangées: Gris, Aubère, Louvet
- les robes composées de trois couleurs mélangées: Rouan
- les robes composées de deux plaques de couleurs: Pie

Hmmmm... le doux parfum d'antan
Pour compléter le descriptif de la robe d'un cheval, on avait quelques particularités:
- les pommelures
- la raie de mulet
- les zébrures sur les membres (et encore je suis même pas sûre que les HN utilisaient ce terme)
- les balzanes et les marques en tête

A l'époque, ça suffisait amplement car la plupart des chevaux étaient vétus de robes classiques (alezans, bais, gris); croiser un aubère ou un louvet était rarissime! Et puis, avec le développement de l'équitation de loisir, on a vu apparaitre de plus en plus de chevaux aux robes bizarres, impossibles à caser dans la classification des HN. Les Haras Nationaux (cette fabuleuse institution quelque peu vieillissante et conservatrice) ont alors révisé leur classification (en 1999) afin de pouvoir décrire ces nouvelles robes. Depuis, c'est un peu du grand n'importe quoi et on se retrouve avec des chevaux qu'on ne sait toujours pas classifier parce que, malgré tous les efforts entrepris pour dépoussiérer notre vieille classification, le descriptif de la robe du cheval est toujours basé sur une observation visuelle du cheval.

Les américains, au contraire, tiennent plus compte de la génétique du cheval. Il y a donc énormément de robes différentes mais la nomenclature est plus juste d'un point de vue génétique.

Pour donner un exemple rapide, chez nous, un cheval anciennement "bai brun foncé" est maintenant "noir pangaré" sauf que la génétique conduisant à produire ce visuel de "noir pangaré" peut être différente d'un cheval à l'autre. Donc il semble erroné de donner à ces deux chevaux le même nom de robe alors qu'elles sont génétiquement différentes...

On va donc tenter de décrypter un peu tout ça...


1) Comment se transmet l'information génétique?

Les différentes caractéristiques d'un individu (couleur de la robe, couleur des yeux...) sont codifiées par les gènes. Chaque gène porte sur une seule caractéristique. Les gènes sont portés par l'ADN.

L'ADN de l'individu (ce qui crée les cellules) est composé de chromosomes. Chaque chromosome porte deux allèles. Ce sont eux qui vont déterminer si le caractère du gène concerné va s'exprimer (être visible) ou pas.

Pour chaque gène, il y a deux allèles. Chacun des parents transmet un seul allèle. C'est comme ça que le petit obtient ses deux allèles. 

Techniquement, chaque allèle est représenté par une lettre. Si l'allèle autorise le gène à s'exprimer, on notera la lettre en majuscule. Si l'allèle n'autorise pas le gène à s'exprimer, on notera la lettre en minuscule.

Comme chaque gène est codifié par deux allèles, deux lettres seront nécessaires pour décrire chaque gène. 

Je me souviens d'un site où ils expliquaient à travers l'exemple d'un gène qui codifierait si le petit est une licorne ou pas (je n'arrive pas à retrouver ce site, si quelqu'un le connait...) donc je vais reprendre cet exemple pour rendre les choses simples.

Admettons que le gène LI indique si l'individu est une licorne ou pas.

Si on a un parent qui est LI/LI (donc "oui" et "oui" pour les deux allèles du gène), il sera visiblement licorne. L'autre parent est Li/Li (donc "non" et "non" pour les deux allèles du gène), il sera visiblement cheval sans corne.

Chaque parent va donner un allèle donc le petit sera forcément LI/Li. 
On dit qu'il est porteur du gène LI mais est-ce que ça veut dire qu'il sera forcément une licorne?

Ca dépend... Si le gène LI est un gène dominant alors à partir du moment où le petit aura un seul "oui" (LI en majuscules), il sera automatiquement licorne car l'allèle LI "écrasera" l'allèle Li.
En revanche, si le gène LI est un gène récessif, il faudra nécessairement deux allèles LI pour que le gène s'exprime. Si on a juste un seul LI, le poulain ne sera pas licorne.

Quand on a deux allèles "oui" (LI/LI), le poulain sera dit homozygote sur le gène LI.
Quand on a un seul allèle "oui" (LI/Li) le poulain sera dit hétérozygote sur le gène LI.

Admettons maintenant que l'on croise une jument LI/Li avec un étalon Li/Li...

  • Si LI est un gène dominant: la jument est licorne, l'étalon est cheval.

Le croisement des deux donnera 4 possibilités pour le poulain:
On a 50% de chances d'avoir un poulain LI/Li et 50% de chance d'avoir un poulain Li/Li.
Comme LI est dominant, le poulain LI/Li sera licorne. Le poulain Li/Li sera forcément cheval sans corne.

  • Si LI est un gène récessif, le poulain LI/Li n'aura pas de corne car il faut nécessairement deux LI pour que le gène puisse s'exprimer. 

De même si LI est récessif, si on croise une jument LI/Li (donc non licorne) avec un étalon LI/Li (donc non licorne), on aura les possibilités suivantes:
On a 50% de chance d'avoir un LI/Li => poulain sans corne mais hétérozydote sur le gène LI, 25% de chances d'avoir un LI/LI => poulain licorne homozigote sur le gène LI et 25% de chances d'avoir un Li/Li => non licorne et non porteur du gène LI.


2) Les robes de base: l'alezan et le noir

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, génétiquement, il n'y a que deux robes de base: l'alezan et le noir. A partir de ces deux robes, on peut créer toutes les autres.

Ces deux robes de base sont codifiées par le gène Extension noté E. Ce gène indique la présence (ou l'absence) d'un pigment, l'eumélanine.
E est dominant donc Ee et EE donneront une robe noire alors que ee donnera une robe alezane.

Si on croise un entier EE (noir) avec une jument ee (alezane), on aura 100% de chances d'avoir un poulain Ee donc visuellement noir. 
Si on croise un entier Ee (noir) et une jument ee (alezane), on aura 50% de chances d'avoir un poulain ee (alezan) et 50% de chances d'avoir un poulain Ee (noir). Deux chevaux alezans donneront un poulain alezan.
Deux chevaux noirs donneront un cheval noir mais qui pourra être hétérozygote (Ee). Ce cheval croisé avec un alezan ou un autre cheval Ee pourra donner un poulain alezan. 
On peut donc avoir deux parents visuellement noirs (tous les deux hétérozygotes donc Ee) qui donnent un poulain alezan (ee)!

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